Il me semble ce matin que nous avons, collectivement, pris l’habitude de penser la santé en termes de systèmes, de diagnostics, de services à offrir ou à rendre accessibles. Nous parlons du droit à la santé comme d’un horizon politique, et c’est juste, c’est nécessaire.
Mais quelque chose d’essentiel se perd dans cette manière de dire : l’expérience humaine du soin.
La santé est un idéal ; elle fluctue, elle échappe, elle ne se garantit pas. Le soin, lui, est un acte vivant, présent, immédiat. Il ne dépend pas seulement d’institutions ou de politiques publiques : il est tissé de gestes, d’écoutes, de présences partagées.
Je ressens profondément que nous avons besoin de déplacer notre regard :
De la performance de la santé vers la profondeur du soin.
De l’état médical vers l'état relationnel.
De la revendication pour des droits techniques vers la revendication d'une dignité vécue dans la fragilité.
Penser le droit à la santé comme un droit au soin, ce n’est pas renier les systèmes ; c’est leur redonner un sens. C’est rappeler que l’être humain n’est pas un problème à corriger, mais une histoire vivante à accompagner.
Ce déplacement est subtil mais révolutionnaire : il exige que nous reconnaissions la vulnérabilité comme une dimension constitutive de la condition humaine, non comme une anomalie à éradiquer.
Je rêve d’un monde où la question ne serait plus seulement :
« Comment soigner ? »
Mais aussi :
« Comment accompagner avec respect, présence et tendresse ceux qui traversent leurs passages difficiles ? »
C’est là, je crois, que bat le cœur d’une véritable justice sociale.
Et c’est peut-être là aussi que commence la guérison de nos sociétés : dans le soin des liens, dans l’attention portée à ce qui est vivant, fragile, et pourtant infiniment précieux.
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