« Je suis né sur une rive, j’ai grandi sur l’autre, je travaille d’un côté et j’ai choisi de vivre de l’autre. Ma vie s’écrit dans ce va-et-vient, comme si la rivière était devenue le fil secret de mon identité. Elle n’est pas qu’un passage ou une frontière : elle est un courant, un souffle, un espace où je me reconnais. »
Depuis toujours, on voudrait me situer : suis-je franco-ontarien ou québécois? Mais mon lieu véritable n’est pas une rive, c’est le courant. La rivière me rappelle que l’identité n’est pas figée. Elle coule, elle se transforme, elle relie et elle sépare tout à la fois.
Être franco-ontarien m’a appris la ténacité, la fierté et la force de défendre une langue dans un monde qui ne la reconnaissait pas toujours. Vivre en Outaouais m’a permis de m’enraciner dans une autre expérience francophone, riche de ses propres luttes et de ses propres fragilités.
Et moi, je me tiens entre les deux. Cet entre-deux pourrait sembler inconfortable, mais il est devenu ma maison. Là, dans la fluidité du passage, j’ai découvert une identité plus vaste : celle d’un passeur. Ni uniquement de là-bas, ni complètement d’ici, mais présent dans les deux à la fois.
Être passeur, c’est accepter de vivre dans l’espace mouvant de la rivière. C’est apprendre à traduire, à relier, à bâtir des ponts. C’est découvrir que l’identité n’est pas seulement un héritage, mais aussi un mouvement, un souffle, une responsabilité. Dans ce tiers espace, j’ai trouvé la cohérence de mon parcours et la source de mon engagement : accompagner les autres à habiter leurs propres passages, à transformer leurs frontières en chemins, et à reconnaître que la force de nos liens dépasse toujours la rigidité de nos appartenances.
Ainsi, je ne suis pas prisonnier d’une étiquette. Je suis le fils d’une rive, le citoyen de l’autre, mais avant tout, l’habitant de la rivière qui les relie. Et c’est de cet espace fluide que je puise mon inspiration pour écouter, accompagner et contribuer à un monde où la résonance a plus de poids que les divisions.
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